Des époux, dans le cadre d’une procédure de divorce, pourraient avoir la séduisante idée de liquider le régime matrimonial de façon (soigneusement) déséquilibrée, et ce, afin de permettre de sauvegarder une partie du patrimoine du fait d’une prévisible procédure collective à l’égard d’un des conjoints.
Dans le divorce par consentement mutuel, les époux présenteraient un projet d’état liquidatif du régime matrimonial, annexé à leur convention de divorce par acte d’Avocat ou à faire homologuer par le Juge aux Affaires Familiales.
Une fois le divorce prononcé, avec homologation et retranscription, les ex-époux se répartissent les biens.
Or, le Tribunal des procédures collectives peut fixer une date de cessation de paiements antérieurement au Jugement de divorce.
Ainsi, il pourrait y avoir nullité de l’acte ainsi accompli pendant la période suspecte (18 mois maximum en amont de l’ouverture de la procédure collective).
L’état liquidatif de communauté établi après la date de cessation des paiements fixée par le Tribunal de Commerce dans le cadre d’une convention de divorce, n’échappe pas aux nullités des actes accomplis pendant la période suspecte (notamment Cour de Cassation, Chambre Commerciale, Arrêt du 7 novembre 2006).
Il faut distinguer des nullités de droit (article L632-1 du Code de Commerce) qui sont automatiques, des nullités facultatives (article L632-2 du Code de Commerce), qui sont soumises à l’appréciation des Juges, c’est-à-dire, concernant tous les actes à titre onéreux accomplis après la date de cessation des paiements, à la condition que celui qui a traité avec le débiteur a eu connaissance de la cessation des paiements.
La nullité de droit n’est possible que si le partage constitue une donation indirecte, voire un contrat déséquilibré (cf. liste exhaustive de l’article L632-1 du Code de Commerce).
Si l’acte n’est pas déséquilibré (évaluation réelle, pas d’abandon de soulte, etc.), le partage peut être attaqué sur la nullité facultative ; cependant, il a été jugé que « si l’épouse avait vraisemblablement connaissance des difficultés financières de son conjoint, il n’est pas prouvé qu’elle connaissait la situation de cessation de paiements, puisqu’elle ne travaillait pas dans l’entreprise » (Cour d’Appel de Nîmes, Arrêt du 10 décembre 1997).
En conséquence, il faut être attentif aux termes du partage et à ses conséquences, pour éviter tout risque de nullité en dépit du divorce prononcé et retranscrit avant l’ouverture de la procédure collective, homologuant le projet d’état liquidatif du régime matrimonial.
Si le divorce intervient après la liquidation judiciaire d’un des époux, le liquidateur doit intervenir dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel pour l’élaboration du projet d’état liquidatif (qui règle les questions par exemple de prestation compensatoire, d’attribution préférentielle, etc.) sous peine d’inopposabilité à la liquidation judiciaire (notamment Cour de Cassation, Arrêt du 20 octobre 2021, Chambre commerciale).
Une étude approfondie relative aux procédures collectives et liquidation du régime matrimonial a été réalisée par le Cabinet.